Un peu de lumière sur Daniel Darc
- Freakoffice
- 19 janv. 2017
- 4 min de lecture

La plupart des gens connaissent ce mec pour avoir cherché le garçon. Ou bien, certains autres le connaissent pour des phrases comme "C'est évident que personne prendrait de l'héroïne si c'était mauvais". Mais derrière l'apparence d'une ancienne star du moment, qui a sombré dans la came et -un petit peu- dans l'oubli, il y a une personne intrigante, très touchante, rebelle, et surtout à fleur de peau.
Daniel Rozoum naît à l'aube des années 60 : une famille juive, une famille devant quitter la Russie pendant la première guerre mondiale, une grand mère morte de la déportation... Eh oui, le gars a tout piqué à Gainsbourg ! Mais je vais pas vous dresser une biographie de Daniel Darc, le plus important de celle ci étant qu'à 18 ans il devient la mega star de Taxi Girl, avec leur morceau Chercher le garçon. Tout le monde le connait pour ça, et même s'il a fait plein de trucs après ça, quand il la joue sur scène il nous dit "Ah, celle là... C'est grâce à celle là que je suis pas sous les ponts aujourd'hui". Enfin, quand il la jouait... En effet, le chanteur nous a quitté il y a 3 ans. Si je suis celui qui vous l'annonce, j'en suis réellement désolé. Mais bon, c'est comme ça, c'est la mort.

J'ai découvert Daniel Darc quelques années avant sa mort. Mon père rentre de chez le disquaire (on croirait quelque chose qui se passe dans les années 70, les disquaires n'éxistent même plus) avec un disque où on voit la photo d'un type avec un air sérieux et un tatouage de croix immense sur le torse, avec écrit devant lui "DARC". Quand mon père ramène un disque, le processus habituel c'est de l'écouter 256 fois dans la voiture avant de l'écouter tout seul. Sauf que là, au bout de seulement 25 fois, je n'arrive pas à me retenir de me cloitrer dans ma chambre et de l'écouter. C'était quelque chose de très particulier, j'avais l'impression d'être à côté d'un mec qui me parlait, très doucement et très calmement, et qui s'énervait parfois d'un coup, emporté par ses émotions. Sa voix n'est pas toujours juste, il a l'air parfois un peu perdu sans sa propre chanson, mais on comprend ce qu'il veut nous dire. On ressent ce qu'il raconte, parce qu'il le raconte sans faire de détours, sans emprunter des chemins infinis. Et puis il y a quelque chose de très intrigant dans sa manière d'interpréter ce qu'il vit, et ce qu'il ressent lui-même. Une sensibilité différente de ce qu'on a l'habitude d'entendre, ou d'écouter. Cette sensibilité, j'ai mis du temps à comprendre que c'était sa foi. Au début, quand je l'écoutais reprendre des psaumes en chanson, je me disais "Ouais bon, c'est un peu hipster (à l'époque le mot existait pas) mais en même temps ça a l'air honnête". Et puis en fait j'ai compris que c'était quelque chose qui fait partie de sa vie, qui est pas juste tatoué sur sa poitrine. Et il s'est passé quelque chose d'assez drôle d'ailleurs ; quand j'ai saisi ce côté important de Daniel Darc, j'ai découvert qu'en dessous de cette croix tatoué, il s'est tatoué un cœur. J'ai compris que c'était quelque chose d'inscrit en lui, et pas un registre dans lequel il pioche pour faire un morceau.
Bon, je viens de vous raconter l'introduction de ma rencontre avec Daniel Darc. Je pourrai continuer, ça prendrait beaucoup de temps, et je suis pas sûr que ça intéresserait tout le monde. Alors je vais maintenant m'attarder sur sa musique, histoire de vous convaincre d'y jeter un coup d'oreille.
Alors tout d'abord, si je conseille Daniel Darc, je conseille aussi de zapper l'épisode Taxi Girl. Je vais pas expliquer pourquoi, écoutez un ou deux morceaux et vous comprendrez. Je pense que certaines œuvres ne sont juste pas faîtes pour vieillir, apparemment ce groupe en fait partie... Mais je pense que le fait que Darc ait fait partie de ce groupe l'a encouragé à faire une carrière solo. Le mec est attiré depuis toujours par le rock, le punk... Ardisson le dit très bien dans une émission : "Le problème avec vous c'est qu'à l'époque vous avez eu un énorme succès avec Taxi Girl qui était un groupe un peu "synthé électro-pop" alors que vous vous êtes un vrai rock'n'roller et le succès que vous avez eu c'est avec un groupe un peu clean...". Et là dessus, le chanteur répond "C'était un malentendu". Il ne l'a pas dit, mais je l'imagine frustré à l'époque de Taxi Girl, et j'imagine que ça a forcément influencé le fait qu'il arrive à faire exactement ce qu'il a envie d'exprimer plus tard.
Il fait de belles chansons, et comme je l'ai dit même si on connait pas toutes les inspirations du mec on sent que c'est sincère. On trouve des textes qui parlent de nana, d'histoires d'amour et d'amoureuses. Mais aussi des histoires d'amitié, de doutes sur lui-même et sur le monde qui l'entoure. Il fait aussi de belles musiques, c'est parfois du rock simple comme on l'aime quand on aime le rock : une guitare, une basse, une batterie et un vieil orgue ; et c'est parfois beaucoup plus calme : des instruments à vent, un piano, ou même un simple ukulélé. Et le changement de style est au service de l'émotion. On écoute parfois un chanteur à l'air paisible, on l'imagine chanter en souriant, parfois même un peu niaisement. Et parfois c'est l'image d'un mec angoissé, pressé, et même désespéré qui nous parvient en pleine tête. Et à vrai dire , on a même de temps en temps du mal à savoir si c'est réellement le même type, ce qui instaure un côté un peu perturbant, mais réel, à fleur de peau. Après tout, qui ne pense pas noir un jour et blanc le lendemain ?
Daniel Darc n'a pas une discographie très longue, il est facilement accessible de l'approcher dans son ordre chronologique. Mais paradoxalement, si vous êtes du genre à vous faire un avis en quelques morceaux, je vous conseille d'écouter son album posthume : Chapelle Sixteen. C'est un double album : le premier disque sont des morceaux finis, et le deuxième est un mélange de maquettes et de séances d'enregistrements. Si vous aimez savoir à qui vous avez à faire, je vous conseille également ce documentaire sur Daniel Darc.
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